Traversée du désert

J’ai commencé ce blog sur un coup de tête. Je venais de rater l’examen d’entrée à l’école d’avocat (CRFPA) et j’avais décidé de partir pour tenter l’aventure de jeune fille au pair aux États-Unis. L’épopée s’était poursuivie de manière totalement improvisée jusqu’au Costa Rica où j’ai fait du volontariat. J’ai adoré écrire pour raconter mes péripéties et les partager. 

Je m’étais dit en quittant la France que ce ne serait que pour quelques mois et qu’au début de l’année 2020 je rentrerai pour me reconcentrer sur le CRFPA. Sauf qu’après avoir goûté à la liberté du voyage en solitaire et foulé le sol costaricain, je n’avais plus aucune envie de rentrer. Encore moins pour passer cet examen. C’était décidé, mon sac à dos et moi-même partirions à travers l’Amérique du Sud voguant au rythme des rencontres, de volontariat en volontariat. PENSE… une épidémie mondiale plus tard, j’ai surtout vogué à l’insu de mon plein gré vers l’avion de rapatriement pour la France. 

S’en sont suivis quelques mois de « traversée du désert » psychologique, un joli condensé de « qui suis-je, où vais-je, que fais-je ». Pourtant de nature optimiste, ça n’allait pas. Je me détestais d’autant plus que j’avais tout pour être heureuse ; je suis une privilégiée surtout comparé à ce que j’avais pu voir à l’étranger. J’ai la chance de toujours pouvoir rentrer à la maison, ma famille et mes amis sont d’un soutien sans faille. Pourtant ça n’allait pas. Je crois qu’une nouvelle fois c’est la peur qui était à l’origine de tous ces maux. Le CRFPA allait de nouveau se jouer dans 5 mois et cette fois-ci en cas d’échec je n’avais aucun plan B et m’enfuir à l’autre bout du monde était désormais inenvisageable. Mais alors qu’est-ce que j’allais bien devenir ? J’avais tellement peur de le rater une deuxième fois que j’ai failli ne pas y retourner. Outre mon entourage, je suis allée jusqu’à me convaincre moi-même que je ne voulais plus être avocate. 

Le pouvoir des mots est tellement fort que j’y ai véritablement cru. Avec le recul quand j’y pense c’est fou toute cette énergie perdue à envisager le pire, à se flageller tous les jours quand, à l’inverse, j’aurais pu m’encourager et y croire, tout simplement. Pourquoi dans le doute toujours choisir de penser au pire ? Et de toute façon le pire c’est quoi ? Ne pas y arriver ? J’avais oublié tous les enseignements tirés de l’année passée, la capacité à rebondir, à se créer de nouvelles opportunités. J’avais oublié qu’il y a toujours d’autres solutions, d’autres chemins. La peur trônait au-dessus de ma tête, telle une épée de Damoclès, et semblait justifier les comportements les plus abjectes envers moi-même. 

J’ai donc réussi à me persuader que je ne voulais plus faire ça, mieux encore je le disais à qui voulait bien l’entendre. Comme pour chercher à justifier à l’avance l’échec qui n’était même pas encore survenu. Quand j’y repense, ce comportement était aussi celui de la crainte de décevoir, de paraitre nulle, « pas assez » ou pas capable. Cette période de remise en question, sans la moindre perspective sur l’après, a duré plusieurs mois. Jusqu’au moment de passer l’examen en fait.

Ensuite j’ai décidé de rester à Paris. En attendant les résultats j’ai postulé pour faire un stage dans une start-up et me confronter au monde de l’entreprenariat. Ça a été une expérience super enrichissante et ça s’est tellement bien passé qu’il m’a été proposé de rester. Dans ma tête les écrits du CRFPA étaient loin et de toute façon je n’avais pas envisagé de pouvoir les réussir donc après les résultats il ne faisait aucun doute que j’accepterai la proposition. Sauf qu’entre-temps j’ai été admissible pour aller passer le grand oral et j’ai finalement été admise à l’examen. L’ironie de la vie parfois… 

« Oublie que t’as aucune chance, fonce (…) », sacré visionnaire ce Jean-Claude. 

***

Il est 3h du matin selon l’écran de mon siège. L’appareil est sombre et silencieux. Alors que rien n’est moins confortable qu’un vol de 10h en classe éco, tout le monde semble avoir trouvé le sommeil dans l’habitacle. Tout le monde sauf moi. La carte virtuelle indique que nous survolons actuellement l’Éthiopie. Je trouve toujours ça incroyable. En quelques heures d’avion on a la chance de pouvoir aller partout. J’aime imaginer la vie des gens en bas. Il y a tellement de choses à découvrir, à apprendre, de personnes à rencontrer. 

Nous volons en direction de Mayotte au large de l’Afrique dans l’Océan indien. J’ai pris un billet un peu sur un coup de tête.  Tous mes cours sont en visio, je devais rendre l’appart que je sous-louais à Paris et mes cousins vivent là-bas en tant qu’expatriés depuis deux ans maintenant. C’était le moment parfait. Un sac à dos bouclé et un test PCR négatif plus tard, j’embarquais vers une nouvelle aventure. Comme d’habitude, j’aimerais la partager avec vous ici. Qui sait, peut-être que certains seront convaincus par la vie d’expatrié à Mayotte et voudront tenter l’aventure (spoiler : c’est le feu). 

A très vite pour lire mes premiers jours sur le sol mahorais.  

Acoua, Mayotte

Alizée

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